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Neurobiologie de la prise alimentaire

01/02/2015
Par Monique LAVIALLE, Roland SALESSE

Résumé : On s'accorde désormais à considérer le cerveau comme l'organe majeur de
l'alimentation. En effet, c'est lui qui intègre les signaux internes (métaboliques, nerveux et
hormonaux), les signaux sensoriels (visuels, olfactifs, gustatifs) mais aussi, et il ne faut pas
l'oublier, les conditions sociales, culturelles et économiques qui constituent des déterminants
majeurs de la qualité de la ration.
Devant cette complexité, notre article s'en tiendra à l'exposé des mécanismes
neurobiologiques de la prise alimentaire.
Le rythme circadien (rythme sur 24 heures), piloté par le cerveau, fixe le cadre temporel du
comportement alimentaire, tandis que les choix alimentaires eux-mêmes sont basés en grande
partie sur des apprentissages olfacto-gustatifs qui commencent sans doute in utero puis
évoluent en fonction du cadre familial et culturel.
On peut considérer l'hypothalamus comme la "tour de contrôle" de la prise alimentaire. Situé
dans le diencéphale ventral, il intègre de nombreux indices métaboliques (glycémie par
exemple), endocrines (comme la leptine ou l'insuline), nerveux (via le nerf vague).
Mais la décision de s'alimenter dépend aussi de structures profondes liées aux émotions
(système limbique) et aux circuits de la récompense (noyau accumbens, aire tegmentale
ventrale), ainsi que de structures corticales "conscientes" impliquées dans les représentations
mentales des aliments et de leur valeur hédonique, et enfin des structures corticales qui leur
sont connectées et qui supportent la décision et l'exécution de l'acte alimentaire.
Ces vingt dernières années, ce tableau s'est encore compliqué du fait de la découverte de
modifications épigénétiques de l'ADN qui, sans altérer sa séquence, altèrent l'expression des
gènes : c'est le phénomène d'empreinte métabolique. Ces modifications sont apportées (ou
effacées) progressivement au cours de la vie, et peuvent même passer à la descendance,
tandis que les bactéries intestinales sont désormais considérées comme un organe à part
entière dont les perturbations expliqueraient certaines maladies métaboliques, dont le
diabète et l'obésité.
Cette complexité fait que les recommandations nutritionnelles devraient être adaptées à
chaque individu, tout en lui fournissant les moyens d'échapper aux pièges de la publicité et de
l'entraînement social