L'agriculture de conservation des sols : une chance pour la planète ?
Une nouvelle prise de conscience
L’agriculture de conservation des sols (ACS) a été initiée outre-Atlantique à la suite du phénomène du Dust Bowl de 1929 aux États-Unis (tempêtes de poussières dans les grandes plaines en raison de l’érosion des sols) et adaptée ensuite aux sols fragiles des Cerrados brésiliens.
Elle s'est révélée être une solution à la lutte contre l'érosion sous climat hostile. Développée en France par des agriculteurs pionniers vers les années 90, cette pratique a rencontré beaucoup de réticences de la part des organismes techniques, et n'occupe aujourd'hui que 5 % de la SAU française.
La prise de conscience du changement climatique par l'opinion, par les filières agroalimentaires et par les décideurs politiques a ravivé l'intérêt de l'ACS avec son réel potentiel de rétention du carbone émis dans l'atmosphère.
Les atouts de l’agriculture de conservation des sols
L’ACS se définit selon trois critères : des sols pas ou peu travaillés, des sols couverts par des intercultures, des rotations longues et diversifiées. Quels sont ses atouts ?
- Des sols peu travaillés préservent l'habitat de la faune, favorisent la circulation et la rétention de l'eau de pluie, et nécessitent moins de carburant et de machines.
- Les plantes cultivées sont des capteurs solaires dont la production, par photosynthèse, est de la biomasse végétale, riche en carbone renouvelable. Occuper les sols plus longtemps par des végétaux, c'est permettre aussi de produire de la matière organique et de la nourriture pour la faune et la flore, et de séquestrer du carbone dans les sols.
- L'allongement des rotations et la diversité des cultures perturbent les cycles des parasites et favorisent les auxiliaires, prédateurs et parasites naturels de ces agresseurs.
Les bénéfices observés sur nos exploitations
Après 25 ans d’abandon du labour, on observe une très forte réduction de l'érosion et de la battance des sols, une amélioration de la portance, une résilience au tassement et une augmentation du taux de matière organique (+ 25 %). Pour les sols crayeux, leur recoloration favorise le réchauffement.
Ces avantages sont très bénéfiques pour les agriculteurs, avec une réduction des coûts d'énergie et de traction (- 40 %), une réduction des besoins en fongicides, insecticides et herbicides, un maintien, voire une amélioration des rendements.
Une solution pour l’avenir
La généralisation de l’agriculture de conservation des sols pourrait ainsi représenter une solution à la réduction de l'effet de serre global. A la veille de la COP 27, il est utile de rappeler l'objectif « 4 pour 1000 » de la COP 21. En effet, si l'ensemble des sols cultivés de la planète augmentaient leur réserve de carbone organique de 0,4% par an, l'agriculture séquestrerait l'intégralité du carbone émis par l'activité humaine. Quel autre secteur d'activité que l’agriculture peut-il promettre une telle solution aux enjeux de climat ?
Christian Rousseau, membre de l’Académie d’agriculture de France, agri-viticulteur en Champagne, président de Rittmo Agroenvironnement*
* Rittmo Agroenvironnement est un centre privé de recherche spécialisé dans le domaine de la fertilisation, des bio intrants et de l’agroenvironnement
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Photo (Entraid) : Couvert d’hiver avant le semis de maïs en agriculture de conservation des sols
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Soil conservation agriculture : a chance for the planet?
A new awareness
Soil conservation agriculture (SCA) was initiated across the Atlantic following the Dust Bowl phenomenon of 1929 in the USA (dust storms in the Great Plains due to soil erosion) and then adapted to the fragile soils of the Brazilian Cerrados.
Soil conservation agriculture has proven to be a solution to erosion control in a hostile climate. Developed in France by pioneering farmers in the 1990s, this practice has met with much reluctance from technical organizations, and today occupies only 5% of the French UAA.
The awareness of climate change by public opinion, the agri-food industry and political decision-makers has revived the interest in SCA with its real potential to retain carbon emitted into the atmosphere.
The advantages of soil conservation agriculture
It is defined according to three criteria: no or little tilled soils, soils covered by intercropping, long and diversified rotations. What are its advantages?
- Low tillage preserves wildlife habitat, promotes the circulation and retention of rainwater, and requires less fuel and machinery.
- Crop plants are solar collectors whose production, through photosynthesis, is plant biomass, rich in renewable carbon. Occupying soils longer with plants also produces organic matter, food for wildlife and sequesters carbon in the soil.
The extension of rotations and the diversity of crops disrupt the cycles of pests and favor the natural predators and parasites of these bioaggressors.
The benefits observed on our farms
After 25 years of abandoning ploughing, we have observed a very strong reduction in erosion and soil compaction, an improvement in bearing capacity, resilience to compaction, and an increase in organic matter (+25%). For chalky soils, their recoloration favors warming.
These advantages are very beneficial for farmers, with a reduction in energy and traction costs (-40%), a reduction in the need for fungicides and insecticides, and a maintenance or even an improvement in yields.
A solution for the future
The generalization of soil conservation agriculture could thus represent a solution to the reduction of the global greenhouse effect. On the eve of COP 27, it is useful to recall the "4 for 1000" objective of COP 21. Indeed, if all cultivated soils on the planet increased their organic carbon reserves by 0.4% per year, agriculture would sequester all the carbon emitted by human activity. What other sector of activity than agriculture can promise such a solution to climate issues?
Christian Rousseau, member of the French Academy of Agriculture, winegrower in Champagne, President of Rittmo Agroenvironment*.
* Rittmo Agroenvironment is a private research center specialized in the field of fertilization, bio-inputs and agro-environment
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