Systèmes alimentaires et coopération entre la France et l’Afrique : l’Académie d’agriculture contribue au débat !
Marie De Lattre-Gasquet et Marion Guillou
À la suite de la rencontre avec plus d’une centaine d’étudiants africains et européens à Montpellier dans le contexte de la construction d’un plaidoyer sur le partenariat Europe-Afrique par l’Académie d’agriculture, trois principales questions ressortent des échanges, qui font écho aux discussions dans les instances internationales.
La première porte sur les interactions politiques et commerciales entre la France et l’Europe d’une part, et les pays d’Afrique d’autre part, et le déséquilibre des partenariats. Sur le plan politique, la reconstruction d’une offre stratégique crédible de la France vis-à-vis de l’Afrique semble indispensable. Sur le plan commercial, la France représente le deuxième stock d’investissements directs (IDE) en Afrique. Les pays d’Afrique exportent vers la France et l’Europe des matières premières brutes (hydrocarbures, produits agricoles, minerais stratégiques) en franchise de droits et sans contingent, et importent essentiellement des produits manufacturés taxés. Contrairement aux idées reçues, le secteur agroalimentaire est innovant. Comment mieux analyser et reconnaître ces interdépendances et leurs conséquences ? Comment transformer les politiques et les relations commerciales de la France et de l’Europe avec l’Afrique et les faire évoluer vers un meilleur équilibre ? Quelles politiques de taxation pour les importations et les exportations ?
La souveraineté, notamment alimentaire, est un second sujet. Elle est devenue une revendication de nombreux pays. L’analyse de la souveraineté alimentaire de la France montre qu’elle décline. La souveraineté alimentaire de l’Union européenne est permise par la montée en puissance agricole de quelques pays, parfois au prix d’une intensification des pratiques agricoles dommageables à l’environnement. Peut-on concevoir la souveraineté alimentaire à la seule échelle d’un pays ? Peut-on promouvoir en même temps la croissance des rendements des productions agricoles et l’agroécologie ? Quel équilibre trouver entre cultures de rente, souvent très importantes en Afrique, et cultures vivrières dans la maîtrise d’une souveraineté alimentaire ? Comment développer l’ensemble des chaînes de valeur, en particulier les capacités locales de transformation ? Comment développer le commerce intra-africain ?
L’avenir de l’aide publique au développement (APD) est le troisième sujet. En 2010, sa transformation en politique publique mondiale était constatée et suscitait des interrogations sur sa fin prochaine. Treize ans plus tard, les montants ont diminué, et les priorités et les partenariats ont évolué. Certains constatent qu’elle est toujours en retard et proposent de poursuivre sa transformation tandis que d’autres souhaitent la reformuler. Ils souhaitent sortir de la relation donateur - bénéficiaire, et constatent que la croissance économique ne signifie pas nécessairement développement, et encore moins développement durable et inclusif. Alors comment penser autrement le développement en Afrique ?
Cet ensemble de questions montre toute l’importance de renouveler la coopération Europe-Afrique sur les systèmes agri-alimentaires.
Pour retrouver le projet de plaidoyer porté par l’Académie : ici