Risques de pénurie alimentaire face aux crises : guerre en Ukraine, changement climatique…
Des marchés mondiaux qui s’affolent
Dès les premiers jours du conflit en Ukraine, les marchés mondiaux de commodités s’affolaient. Les hausses des cours de l’énergie et des matières premières grimpaient comme si « l’intervention spéciale de la Russie en Ukraine » lancée le 24 février 2022 devait entraîner à court terme une raréfaction de l’offre internationale de gaz, de pétrole, de métaux, d’engrais, de blé, de maïs, de viandes. Les cours mondiaux du blé s’envolaient, dépassant même un moment les 415 USD /t. Les hausses des prix des engrais, de l’énergie et d’autres matières premières, plus ou moins corrélés à ceux de l’énergie, s’annonçaient en « fois 3 ou plus », pour reprendre l’expression usuelle des producteurs agricoles.
Pas de baisse importante de l’approvisionnement et de la collecte
Pourtant la Fédération de Russie ne décidait pas de réduire l’approvisionnement de son réseau transcontinental d’oléoducs, ne mettait pas un terme à ses livraisons à la Chine ou à l’Europe. Pas de baisse notable non plus de la production gazière ou pétrolière des autres grands pays producteurs, pas de variation inattendue de la consommation énergétique mondiale, malgré les exhortations des experts du Giec pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.
Les données de la FAO ne montrent aucune baisse importante de la collecte ou des stocks céréaliers. La production pour la campagne 2021/2022 s’élevait à 2 813 Mt, alors qu’elle n’était que de 2 645 Mt pour la campagne 2018/2019, permettant une légère progression des stocks de fin de campagne, de 832 Mt à 858 Mt. Pour le blé, la production mondiale a atteint 778 Mt pour 2021/2022, progressant de près de cinquante millions de tonnes par rapport à la campagne 2018/2019. La dernière campagne se terminait avec des stocks totaux de 299 Mt.
Les prévisions de la FAO pour la prochaine campagne (2022/2023), se caractérisent par une légère baisse de la production de céréales à 2 756 Mt.
Une détente des marchés des céréales
Logiquement, les hausses les plus fortes ont porté sur le gaz naturel et par ricochet sur les engrais. Pour les céréales, après quelques semaines de panique, les marchés se sont détendus. Les accords d’Istanbul entre la Russie, la Turquie, les Nations unies et l’Ukraine, en réduisant significativement les incertitudes sur la circulation des navires en mer Noire ont conduit à calmer les anticipations à la hausse des céréales.
Pour fragiles qu’ils soient, ces accords ouvrent des perspectives pour envisager le futur d’un conflit qui révèle l’ampleur des tensions géopolitiques mondiales. Pour développer ces sujets, l’Académie d’agriculture de France organise le 8 février 2023 avec le groupe Crédit agricole le colloque « Quels risques de pénurie alimentaire face aux crises ? Pandémie, guerre en Ukraine, aléas climatiques… » qui réunira un panel des meilleurs experts.
Jean-Jacques Hervé, ancien président de l’Académie d’agriculture de France et Philippe Chalmin, économiste, professeur d’université et membre de l’Académie d’agriculture de France
> S’inscrire (quelques places sont encore disponibles) au : Colloque État de l'agriculture 2023 : Quels risques de pénurie alimentaire face aux crises ? Pandémie, guerre en Ukraine, aléas climatiques…
Photo (FAO) : Chaque année, des pénuries alimentaires menacent des millions de personnes
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Risk of food shortages in the face of crises : war in Ukraine, climate change...
Global markets in turmoil
From the very first days of the conflict in Ukraine, global commodity markets were in a panic. Energy and commodity prices rose as if Russia's "special intervention in Ukraine", launched on 24 February 2022, would lead to a short-term shortage of international supplies of gas, oil, metals, fertilisers, wheat, corn and meat. World wheat prices soared, even exceeding for a time USD 415 per tonne. Increases in the prices of fertilisers, energy and other raw materials, more or less correlated with those of energy, were expected to be "times 3 or more", to use the usual expression of agricultural producers.
No significant drop in supply and collection
However, the Russian Federation did not decide to reduce supplies to its transcontinental pipeline network, nor did it halt its deliveries to China or Europe. Nor was there any noticeable drop in gas or oil production in other major producing countries, or any unexpected increase in global energy consumption, despite the exhortations of IPCC experts to reduce greenhouse gas emissions.
FAO data show no significant decline in cereal collections or stocks. Production for the 2021/2022 season was 2,813 Mt, up from 2,645 Mt in the 2018/2019 season, allowing for a slight increase in ending stocks, from 832 Mt to 858 Mt. For wheat, world production has reached 778 Mt for 2021/2022, up by almost fifty million tonnes compared to the 2018/2019 campaign. The last season ended with total stocks of 299 Mt.
FAO forecasts for the next season (2022/2023) are characterised by a slight decrease in cereal production to 2,756 Mt.
An easing of the cereals markets
Logically, the strongest increases were in natural gas and, by extension, in fertiliser. For cereals, after a few weeks of panic, the markets have resumed their downward trend. The Istanbul agreements between Russia, Turkey, the United Nations and Ukraine, by significantly reducing the uncertainties on the circulation of ships in the Black Sea, led to a calming of expectations on the rise of cereals.
Fragile as they are, these agreements open up perspectives for the future of a conflict that reveals the extent of global geopolitical tensions. To develop these issues, the Académie d'agriculture de France is organising a conference on 8 February 2023 with the Crédit agricole Group entitled "What are the risks of food shortages in the face of crises ? Pandemic, war in Ukraine, climatic hazards..." which will bring together a panel of the best experts.
Jean-Jacques Hervé, former President of the French Academy of Agriculture and Philippe Chalmin, economist, university professor an member of the French Academy of Agriculture
> Register (a few places are still available) for : State of Agriculture 2023 Conference: What are the risks of food shortages in the face of crises? Pandemic, war in Ukraine, climatic hazards...