Ancien directeur des affaires internationales � l'Assemblée permanente des Chambres d'agriculture
Jean-Claude CLAVEL
(1928 - 2015)
Notre confrère Jean-Claude Clavel est décédé le 3 février 2015. Ancien élève de l’Ecole nationale d’agriculture de Grignon, Jean-Claude Clavel était homme d’engagement et fervent patriote. Il voulait faire une carrière militaire dans la marine ; il ne le pourra en raison d’une vue défaillante. Sorti sous-lieutenant de l’école d’artillerie de Châlons-sur-Marne, il sera muté à Haguenau puis en Tunisie au moment où le pays accédait à l’autonomie interne. Après avoir été rappelé en Algérie en 1956, dans l’année clé qui précédera l’accession à l’indépendance en 1962, il fera régulièrement des périodes militaires et en 1969 il sera auditeur de l’Institut des Hautes Etudes de la Défense nationale et nommé un peu plus tard chef d’escadron.
Le déroulement de sa carrière professionnelle découle de la double rencontre d’un homme - Jean Deleau, président de l’AGPB - et d’une idée - la politique agricole commune.
Au sein de la profession agricole, il était l’un des derniers survivants à avoir, depuis l’origine, suivi la construction de la PAC. Son parcours professionnel le conduira de l’AGPB à la FNSEA, puis du syndicalisme agricole à l’APCA, tout en restant le fidèle collaborateur et conseiller de Jean Deleau. Il sera successivement chef du service international de la FNSEA, sous-directeur puis directeur des affaires européennes et internationales de l’APCA où il prendra sa retraite en 1988.
Sa présence dans les instances européennes à Bruxelles a été le prolongement naturel de son activité en France. Il était membre des experts généraux du COPA de 1967 à 1975, et président en 1970, puis du Conseil Economique et Social des communautés européennes de 1971 à 1982, et de 1986 à 1989. A de nombreuses reprises, y compris à la FIPA, il sera dans ces instances rapporteur d’avis concernant aussi bien l’agriculture européenne que les pays en voie de développement.
Jean-Claude Clavel était un homme de conviction et très concret dans sa manière de raisonner. Nul n’était besoin d’être un visionnaire puisque les fondements de la politique agricole commune étaient établis, les voies étaient tracées et les buts à atteindre très clairs : mettre en place les outils juridiques et les moyens financiers et commerciaux pour créer une politique agricole commune permettant en particulier à l’agriculture française d’être au premier plan en Europe.
Jean-Claude Clavel s’attacha à cette tâche, sans état d’âme, sûr de lui et passionné par un métier qui correspondait à ses convictions philosophiques et politiques profondes. La PAC à caractère supranational devait être l’un des premiers piliers de la construction d’une Europe fédérale de même nature institutionnelle. Comme beaucoup de ses collègues, il sera affecté par l’altération de la PAC, sous les effets conjugués de la mondialisation des échanges et de la politique libérale et agressive menée par les américains et les anglo-saxons.
Homme d’action et de réflexion, Jean-Claude Clavel prendra sa retraite, heureux d’avoir fait une carrière sans à-coups. Blessé comme d’autres qui se faisaient une certaine idée de l’Europe, se sachant privé de partenaires français et européens qu’il fallait écouter et convaincre, n’ayant plus de « combat » à mener avec les organisations professionnelles agricoles pour défendre l’idéal européen, tel celui engagé au moment des élections présidentielle de 1965, il fera preuve dans ses écrits du même dynamisme et du même enthousiasme qu’il avait eus dans sa vie active.
Tout d’abord, en approfondissant les réflexions que l’on trouve dans ses ouvrages publiés à l’époque. On peut citer « Le dossier agricole du marché commun » 1969, « l’Europe au fil du jour » (1948-1978) écrit en collaboration avec Pierre Collet en 1979. En 2008, sur ce même registre, il laisse dans « l’Agriculture, l’Europe, le Monde » un témoignage sur l’action européenne et internationale des organisations agricoles, ouvrage non publié, ce que l’on peut regretter, mais le tapuscrit a été déposé aux archives de l’Académie d’Agriculture de France où les historiens pourront les consulter.
Il a été élu membre de l’Académie en 1981, secrétaire de section de 1982 à 1985 et de 1990 à 1995 et président en 2002. Il y fera de nombreuses communications et interventions en séance, faisant profiter à ses confrères et au public de sa remarquable connaissance des hommes et des situations du monde agricole français et communautaire.
Durant cette même période et jusqu’à ses derniers moments, il s’appliquera à enrichir les archives de sa famille par des recherches généalogiques et historiques. Président Directeur général en 1993 des Cristalleries de Saint Louis, il écrira « L’histoire des hommes et des familles à la tête des cristalleries ».
Jean-Claude Clavel laisse le souvenir d’un homme loyal, respectueux des hiérarchies, sans pour autant masquer son point de vue et ses convictions dans un monde agricole où les élus étaient très attachés à leurs prérogatives, un collaborateur respecté par son entourage et à qui on pouvait faire confiance ; un homme rigoureux, précis et fin dans ses analyses, un travailleur acharné, un homme dont l’autorité était parfois marquée par une certaine raideur.
Avec notre regretté confrère, Jean Deleau, Jean-Claude Clavel a été un des acteurs de la construction de la politique agricole commune.
Il était chevalier de la Légion d’Honneur, commandeur du Mérite Agricole et membre du Conseil de l’Ordre du Mérite Agricole.
René GROUSSARD